Les mammifères terrestres à la trace

Au cours des 50 dernières années, l’Homme a fait disparaître environ 60 % des vertébrés de la surface du globe. La situation est alarmante, particulièrement en Asie où la majorité des grands mammifères sont menacés d’extinction. Pour protéger ces espèces, une bonne connaissance de leurs distributions, leurs effectifs et leurs habitats est indispensable. Il existe de nombreuses méthodes fiables pour l’inventaire et le comptage des populations d’animaux sauvages, mais leurs coûts de mise en œuvre prohibitifs limitent leurs usages à quelques espèces.

En raison de son rapport coût/efficacité avantageux, l’ADNe a conquis une place de choix au sein des méthodes d’inventaire de biodiversité en milieu aquatique. Mais, à ce jour, très peu de recherches ont été menées pour évaluer son efficacité en milieu terrestre, notamment pour détecter les mammifères.

En 2018, WWF et SPYGEN ont décidé de relever ce défi et d’explorer la possibilité d’inventorier les mammifères terrestres en étudiant l’ADNe extrait à partir d’échantillons d’eau. Ainsi, 60 pièges photos ont été déployés sur 1 000 kilomètres carrés en Colombie-Britannique.

L’échantillonnage ADNe a permis de détecter davantage de mammifères que les pièges photos.

De l’eau a été prélevée dans les ruisseaux à proximité de chaque piège, ainsi qu’à l’embouchure des torrents dont les ramifications drainaient les bassins versants de l’aire d’étude. L’échantillonnage ADNe a permis de détecter davantage de mammifères que les pièges photos, avec une efficacité remarquable pour les rongeurs, les ongulés, les chauves-souris et certaines espèces aux mœurs semi-aquatiques. Ces résultats suggèrent qu’il est possible de détecter la quasi-totalité des mammifères terrestres présents dans une région, simplement à partir de l’analyse ADNe de larges volumes d’eau prélevés dans les cours d’eau qui la traversent. Et bien que des recherches soient nécessaires pour améliorer encore la détection des carnivores, comme les félins, l’ADNe est en voie de devenir un outil précieux pour l’étude et la protection d’espèces menacées, comme le tigre ou le rhinocéros de Sumatra.

© Sumatran rhinoceros / Kaisa Siren & Bengal tiger / Nitish Madan WWF International